L’orgue de l’église de Saint Pierre d’Albigny a été édifié dans le style des instruments de Thuringe et de Saxe, notamment des orgues qu’Heinrich Gottfried Trost, le plus célèbre des facteurs thuringeois, construisit à Waltershausen (1730) et à Altenburg (1739).
L’esthétique de l’instrument
Le premier objectif de l’orgue en Allemagne centrale est le soutien du chant de l’assemblée, même s’il est utilisé aussi comme instrument soliste et concertant.
Le recueil de chorals édité par Gottfried Friedrich Kauffmann entre 1733 et 1740 montre que le compositeur affectionne l’usage des jeux de 16 pieds aux manuels, et en particulier le Fagott de 16 pieds dont son orgue de Merseburg était pourvu.
L’orgue thuringeois
Ces termes caractérisent l’orgue thuringeois : « gravité » et « expressivité ».
« Les organistes allemands veulent avant tout émouvoir, remuer les âmes et les élever ». (Martin Gester)
Les facteurs d’orgue multiplient les jeux de huit pieds : Montres, gambes, flûtes, bourdons, permettant une grande souplesse dans l’accompagnement du chant et des instruments.
Ces jeux montrent tout l’intérêt que l’on portait aux cordes frottées au XVIII° siècle.
Les orgues de Thuringe préfèrent la couleur et la luminosité plutôt que l’éclat et la brillance des orgues du nord de l’Allemagne, développant une sonorité ample, vaste, englobante (la fameuse « Gravität » préconisée par Jean-Sébastien Bach) : la principale qualité de l’orgue est dans son chant.
L’orgue est accordé à 415 selon un tempérament proche de celui de Schlick.
Jeux « baladeurs »
Heinrich Gottfried Trost avait mis au point un système d’emprunt de jeux entre la Pédale et le Hauptwerk. Dominique Thomas utilise ici le système de jeux « baladeurs », procédé mis au point il y a 15 ans qui permet astucieusement d’utiliser un orgue de 18 jeux comme s’il en contenait effectivement… 29 !
L’orgue de Mühlausen
Jean-Sébastien Bach avait fait effectuer des transformations sur l’orgue de Mühlausen, transformations reprises par Dominique Thomas dans la composition de l’orgue de Saint Pierre : Fagott de 16 pieds, Viola de Gamba et Nasat sur le Hauptwerk, la Schalmey comme anche de 8 pieds au Positif et à la pédale, le Quintaton baladeur entre le Hauptwerk et le Positiv qui renforce les fondamentales, le jeu de flûte de 4 pieds, de Nasat de 3 pieds et de Gemshorn de 2 pieds coniques, de sorte que leurs timbres légèrement gambés se rapprochent des sonorités des instruments à cordes.
(voir la composition de l’orgue)